Jean-Pierre Schetz (1921-1986)
Jean-Pierre Schetz, l’habitant et le créateur d’ « Un Coin au soleil » naît le 10 novembre 1921. Il vit ses premières années dans la province du Limbourg (à Reppel, près de Brée) et sa famille s’installe à Liège à la fin des années 20. En 1952, il épouse Josée Leruth. Le couple s’établit, durant les années soixante, dans une cité sociale de Jupille, sur les hauteurs de Liège. Jean-Pierre Schetz est à ce moment-là employé au service de la voirie de la Ville de Liège où il avait travaillé antérieurement comme ferrailleur et maçon).
A l’époque de leur entrée
dans la maison, la cité sociale dans laquelle elle s’intègre est flambant
neuve. Mais Jean-Pierre Schetz est fortement gêné par un élément qu’il juge
encombrant dans son environnement propre : l’imposante couche de béton, qui
comble la différence de niveaux entre la maison et la rue. Il décide de se
débarrasser de cette matière lourde et d’en remplacer la surface par une bonne
couche de terre. Dans la suite, il y plante des sapins, des arbustes et toutes
sortes de fleurs (une soixantaine de variétés y étaient répertoriées) ; il
y installe aussi de belles pierres. A partir de ce moment-là, il n’a de cesse
de penser à l’aménagement de son jardin…
Nous sommes au début des
années 70. En dehors de son travail d’employé, Jean-Pierre Schetz œuvre
constamment à l’habillage de son jardin, s’y investissant tout entier :
dès qu’il le peut, il y façonne des sujets en tous genres et y fait naître de
singulières visions. Aux dires de certains voisins, il est très souvent
accompagné de son mainate en cage. L’hiver n’est pas un obstacle à sa
créativité : c’est dans sa cave alors qu’il élabore ses pièces diverses
et, à l’occasion des festivités de Noël, il travaille sur l’illumination de son
jardin.
Qu’y fait-il au juste ? Outre l’entretien régulier de la végétation, il sculpte, modèle, assemble, colle, insère, met en couleur toute une série de motifs et de figures dont il peuple progressivement l’espace. L’élément le plus imposant, pour ses dimensions et son esthétique, est sans conteste un château fait de pierres : il frappe à ce point les imaginations qu’il devient le point de ralliement des enfants des environs, leur décor de jeux. L’ouvrage prend ainsi vie grâce à la présence des enfants.
Sa matière première pour
réaliser toutes ses images, Jean-Pierre Schetz la trouve essentiellement dans
des brocantes ou des décharges, au bord des routes et le long des ruisseaux.
Tout, ou presque, est de la récupération (statuettes, vaisselle cassée, morceaux
de vases, coquillages, souches et racines d’arbres, branches tordues, pierres
de calcaire, etc.). Ce sont donc essentiellement des petits riens, des choses
mises au rebut, associés à quelque substance naturelle et mis bout à bout, qui
constituent le tableau du créateur et rendent sa composition fantastique.
Car c’est bien là un lieu
fabuleux, un terrain de songes, une utopie vraie, qu’il érige progressivement,
jour après jour, des années durant. Et c’est tout un monde en soi – personnages
et animaux étranges, paysage féerique, végétation opulente – qui prend place au
jardin et fascine le regard : parce qu’il marie la nature et l’art, parce
qu’il illustre aussi la fièvre créatrice de son auteur.
Jean-Pierre Schetz décède
au milieu des années 80, alors qu’il travaille dans son jardin. Sa femme
continue alors à entretenir son ouvrage. Quelques mois après sa mort, en 2006,
l’environnement est en très grande partie détruit, à l’instigation de la
société gestionnaire de la cité sociale. Le couple Schetz n’ayant pas eu
d’enfant, c’est un neveu, habitant Gand, qui récolte la modeste documentation
(constituée de quelques articles de presse et de photographies) relative à ce
prolifique ensemble d’ « Un Coin au Soleil ».
Brigitte Van den Bossche,
d’après un extrait du dossier pédagogique « Un
Coin au Soleil ». L’astre imaginaire de Jean-Pierre Schetz.
L’exposition : « Un Coin au
Soleil ». Le jardin singulier de Jean-Pierre Schetz
Sur les hauteurs de Liège, au cœur d’une cité sociale, s’affichait jusqu’en 2006 un étonnant jardin. De nombreuses sculptures et figures insolites, nichées dans une végétation luxuriante, le distinguaient des autres jardins environnants : elles animaient le paysage, l’embrasaient même, rompant de manière très manifeste avec le cadre standardisé des alentours. Sorte de marque signalétique, l’inscription « Un Coin au Soleil » exposée sur la façade de la maison particularisait encore l’espace en question. Somme toute, cet environnement avait des allures de petit cabinet de curiosités à ciel ouvert.
Cet ensemble imagé était
l’œuvre de Jean-Pierre Schetz, un créateur autodidacte. Se frayant un chemin
dans un univers imaginaire, il brisa peu à peu la monotonie du paysage et de
son quotidien. De fait, il enlumina surtout sa vie.
Sa composition, habillée
principalement de silhouettes en béton, pierres et coquillages, n’existe plus
aujourd’hui. A l’été 2006, elle a été considérablement détruite. Un film
documentaire a été réalisé à la suite, à l’initiative de l’asbl C-paje : il
s’intitule « Un Coin au
Soleil ». L’astre imaginaire de Jean-Pierre Schetz. Ce film
s’accompagne d’un dossier pédagogique.
L’asbl C-paje
L’asbl C-paje - Collectif
pour la Promotion de l’Animation Jeunesse Enfance - est une organisation
de jeunesse reconnue. Elle rassemble des associations et structures ainsi que
des professionnels socioéducatifs dont le dénominateur commun est le travail
socioculturel avec les enfants et les jeunes. Par une approche créative,
ouverte, égalitaire et émancipatrice, le C-paje participe au développement et à
la promotion d’une animation de qualité à destination de l’Enfance-Jeunesse.
Plus d’infos sur http://www.c-paje.net
Le projet de films
documentaires
« Un Coin au Soleil ». L’astre imaginaire de
Jean-Pierre Schetz est le premier opus d’un projet spécifique
de l’asbl C-paje : la réalisation de films documentaires relatifs à des
environnements hors normes, aménagés par des créateurs autodidactes.
Ce projet, s’adressant à
un large public, repose sur un triple objectif :
-
dévoiler de monumentaux ouvrages d’art qui
renvoient à l’inventivité, l’imagination, la créativité et l’esprit visionnaire
de leurs créateurs qui ne suivent aucune piste académique, mais créent pour
eux-mêmes, dans le seul but d’embellir leur quotidien, leur vie ;
-
reconnaître une forme d’art inclassable, si ce
n’est dans la marge de l’art ;
-
conserver traces d’environnements qui ne sont pas
destinés à la pérennité – certains étant même en phase de disparition.
De manière plus
particulière aussi, ce projet s’adresse au secteur socioéducatif puisqu’à
certains égards, les environnements pris en compte présentent d’évidentes
similitudes avec des aménagements singuliers d’espaces conçus par des enfants
dans un contexte associatif. Les intentions de ce projet sont, précisément dans
ce cadre, les suivantes :
-
inspirer des
processus créatifs dans les domaines complémentaires de l’Education permanente,
de la Culture et de la Jeunesse ;
-
intéresser les
professionnels de l’éducation et de l’animation à des projets d’aménagement
d’espaces, enrichir leurs propositions créatives dans le rapport à l’espace et
au patrimoine culturel ;
-
aborder et mettre en
valeur l’importance de l’action locale (intervention sur son environnement).